Le baguage des oiseaux au Canada
Le baguage des oiseaux :
- date déjà de plusieurs siècles; au début, on baguait surtout les éperviers utilisés en fauconnerie ou encore les pigeons voyageurs
- fait partie d’un programme depuis 1923 au Canada
- contribue à la protection des habitats en fournissant des données qui permettent la mise sur pied de programmes, tels que le Réseau de réserves pour les oiseaux de rivage de l’hémisphère occidental, mis en place en 1986
- est effectué par environ 900 bagueurs autorisés au Canada; on bague chaque année plus de 300 000 oiseaux appartenant à environ 300 espèces
Comment le baguage est effectué
Le baguage des oiseaux est un des outils privilégiés de l’ornithologie. Les oiseaux sauvages sont capturés et marqués, habituellement à l’aide d’une bague en métal numérotée que l’on fixe à leur patte. Le bagueur inscrit des renseignements sur l’oiseau et sur l’endroit et la date de son baguage.
Les données provenant des bagues récupérées nous aident à connaître la répartition et les déplacements des espèces, leur nombre relatif, leur production annuelle, la durée de vie des sujets et les causes de mortalité. Ces renseignements nous permettent de mieux comprendre les oiseaux et leurs habitudes et de concevoir des programmes de gestion et de conservation de cette ressource.
Les oiseaux peuvent être bagués à tout âge, pourvu que leur patte soit assez grosse pour garder la bague. Les jeunes peuvent être pris dans le nid avant qu’ils soient en mesure de voler; les adultes sont généralement capturés au moyen de pièges ou de filets.
On a conçu différents types de pièges afin de capturer les oiseaux de la façon la plus sécuritaire possible. Les pièges installés près des mangeoires comportant un appât ou près des nids, lorsque les oiseaux sont en période d’incubation, sont généralement efficaces. Le volume II du document intitulé Baguage des oiseaux de l’Amérique du Nord (SCF et coll., 1977) décrit en détail la conception et la construction de ces pièges.
Pour capturer les oiseaux chanteurs, on utilise fréquemment un filet japonais. Ce filet en nylon à mailles fines est tendu entre deux perches, dans un endroit où les oiseaux sont susceptibles de passer. Lorsque l’oiseau se heurte au filet, il s’y emmêle; il n’est pas blessé, mais il ne peut pas s’échapper. Les bagueurs vérifient régulièrement les filets, prélèvent les oiseaux et procèdent à leur baguage. Cette méthode exige beaucoup d’expérience et d’adresse, car il ne faut pas blesser les oiseaux lors du prélèvement.
On utilise aussi le filet à projectiles entraîneurs afin de capturer des oiseaux rassemblés en groupes serrés pour se nourrir ou se reposer. On attire d’abord les oiseaux dans la zone choisie au moyen d’appâts, puis on allume de petites fusées attachées au filet pour faire tomber celui-ci sur les oiseaux pendant qu’ils se nourrissent.
Les oiseaux doivent être identifiés par espèce, âge et sexe avant la pose des bagues. On compte, sur le continent nord-américain, environ 645 espèces d’oiseaux qui se reproduisent au nord du Mexique, et la plupart sont faciles à reconnaître avec un peu de pratique. Par contre, il est généralement plus difficile de déterminer l’âge et le sexe d’un oiseau. Divers critères sont utilisés, selon l’espèce et la période de l’année.
On doit observer la forme, la couleur et la texture des plumes, la couleur du bec, de la bouche ou des yeux, le stade et le type de mue ainsi que le degré d’ossification du crâne. La présence d’une zone déplumée sur le ventre de certains oiseaux ou la protubérance du cloaque — chez les mâles en période d’activité sexuelle — peuvent aider à établir l’âge et le sexe d’un oiseau pendant la période de reproduction.
Avant de poser la bague, les bagueurs enregistrent la date et le lieu, l’espèce baguée ainsi que le numéro de la bague. L’âge et le sexe de l’oiseau doivent aussi être inscrits s’ils sont connus.
Les bagueurs prennent souvent note d’autres renseignements qui leur seront utiles pour certains projets particuliers, par exemple, l’importance des accumulations de graisse, le nombre et le type de parasites, les mensurations de l’oiseau ou le stade de la mue.
La grandeur et le type de bague varient selon l’espèce visée. La bague doit être assez grande pour ne pas serrer la patte de l’oiseau, tout en étant assez petite pour ne pas tomber ou ne pas nuire aux activités de l’oiseau. Les colibris sont si petits que le bagueur doit, dans leur cas, couper et ajuster la bague pour chacun d’eux.
Quant aux gros oiseaux de proie comme les éperviers, les buses et les aigles, il faut des bagues enclenchantes spéciales ou à rivet, puisque celles en aluminium à joint abouté utilisées dans la majorité des cas ne résistent pas toujours à leurs coups de bec (voir l’illustration).
On pose la bague en l’ajustant soigneusement autour de la partie inférieure de la patte, à l’aide d’une pince. Les bagues portent l’inscription « Call 1-800-327-BAND » ou « Write Bird Band Laurel MD 20708 USA », suivie d’un numéro de huit ou neuf chiffres.
En plus des bagues métalliques courantes, on utilise d’autres dispositifs de marquage comme des colliers, des banderoles en plastique, des étiquettes alaires ou des bandes en plastique posées sur le bec; on peut aussi avoir recours à des marques de peinture ou de teinture, ou couper certaines plumes. Ce sont les bagues colorées en plastique qui servent le plus souvent de marqueurs auxiliaires. Elles sont habituellement codées afin que l’on puisse reconnaître un oiseau à vue sans avoir à le capturer de nouveau.
Au-delà de 300 000 oiseaux sont bagués chaque année au Canada par environ 900 bagueurs autorisés. Environ 300 des quelque 518 espèces d’oiseaux qui fréquentent le Canada sont baguées chaque année.
Un peu plus de la moitié des individus bagués au Canada sont des oiseaux considérés comme gibier, et leur baguage est effectué par des organismes gouvernementaux; les autres appartiennent à des espèces non gibier, dont les oiseaux chanteurs.
Qui est responsable?
Lorsqu’on a commencé à baguer systématiquement les oiseaux en Amérique du Nord, au début du siècle, les efforts des nombreux organismes en cause étaient très peu coordonnés. Une grande partie du public ignorait tout de cette pratique et de son utilité, et de nombreuses bagues n’étaient pas retournées au bagueur. Au même moment, les écologistes prenaient conscience de la nécessité de mettre en œuvre un plan de conservation et de gestion des oiseaux migrateurs de tout le continent. La chasse commerciale devenait excessive et de nombreuses espèces étaient menacées.
Les préoccupations du public touchant le sort de la Tourte voyageuse, la diminution des stocks de sauvagine et la destruction des aigrettes pour leurs plumes ont mené à une entente internationale sur la conservation des oiseaux migrateurs. En 1916, la Grande-Bretagne, au nom du Canada, et les États-Unis ont signé la Convention concernant les oiseaux migrateurs, qui prévoyait la protection des oiseaux migrateurs et réglementait la chasse à ces oiseaux dans les deux pays. En 1936, les États-Unis ont signé un traité avec le Mexique, étendant ainsi la protection à toute l’Amérique du Nord.
Les organismes gouvernementaux chargés d’assurer l’application de la Convention ont également coordonné les activités de baguage sur le continent. Le Bureau de baguage des oiseaux du Canada, créé en 1923, a été chargé de délivrer les permis, de fournir les bagues et de tenir des dossiers sur toutes les activités de baguage des oiseaux au pays. Le programme est maintenant administré par le Service canadien de la faune (SCF) du ministère de l’Environnement, à Ottawa. Aux États-Unis, le U.S. Bureau of Biological Survey — devenu le U.S. Fish and Wildlife Service — mis sur pied en 1920 était chargé de responsabilités semblables. Le Bird Banding Laboratory, à Washington (D.C.), est devenu le centre d’activités de baguage des oiseaux aux États-Unis.
Des liens étroits existent entre les deux bureaux, et des bagues identiques portant des numéros différents sont utilisées par les deux pays. Les dossiers centraux conservés à Washington, D.C. renferment les données sur tous les oiseaux bagués en Amérique du Nord.
La récupération des bagues
Si vous trouvez un oiseau muni d’une bague, il est important de réunir le plus de renseignements possibles sur cet oiseau et de retourner la bague, accompagnée de ces renseignements, au Bureau de baguage des oiseaux du Canada, Service canadien de la faune, Ottawa (Ontario) KlA OH3.
Aplatissez la bague et collez-la à l’aide de ruban adhésif sur une feuille de papier sur laquelle vous indiquerez lisiblement votre nom, votre adresse, la date à laquelle l’oiseau a été trouvé, le lieu (avec le plus de précision possible, par exemple, à quelle distance de la ville la plus près et dans quelle direction), et l’espèce (ainsi que l’âge et le sexe si possible). Précisez aussi comment l’oiseau a été trouvé ou tué.
Si l’oiseau portant une bague est vivant, n’enlevez pas la bague; prenez note du plus grand nombre de renseignements possibles et relâchez l’oiseau.
Après avoir reçu votre rapport, le Bureau de baguage des oiseaux du Canada vous fera parvenir un certificat d’appréciation sur lequel seront précisés l’endroit où l’oiseau a été bagué, le nom du bagueur et l’espèce d’oiseau. Le bagueur est également informé du lieu et de la date de l’observation.
Environ 10 p. 100 des bagues des oiseaux considérés comme gibier posées au Canada sont récupérées; dans le cas des oiseaux non gibier, le taux de récupération est inférieur à 1 p. 100.
Ce que nous apprenons
Les données recueillies grâce au baguage des oiseaux sont utiles aux chercheurs et aux gestionnaires. L’identification des oiseaux nous permet d’étudier leur dispersion et leur migration, leur comportement et leur structure sociale, leur longévité et leur taux de survie, le succès de la reproduction et l’accroissement de leurs effectifs.
De nombreuses études ont porté sur les déplacements des oiseaux. Vers la fin de chaque été, des milliers de canards, et d’oies et bernaches sont bagués dans leur aire de nidification au Canada. Grâce aux bagues récupérées au cours de la saison de chasse à l’automne, nous pouvons retracer leur parcours de migration jusque dans leur aire d’hivernage dans le Sud. Les renseignements obtenus sur les déplacements, les effectifs et le taux de survie de la sauvagine grâce au baguage influent sur les règlements de chasse.
En 1986, en se fondant sur l’information provenant du baguage, on a commencé à établir le Réseau de réserves pour les oiseaux de rivage de l’hémisphère occidental, qui protège les habitats ayant une importance vitale pour les oiseaux de rivage au Canada, aux États-Unis et en Amérique latine. Le baguage est aussi utilisé comme moyen de déterminer les effets du déboisement sur les oiseaux qui hivernent en Amérique latine et migrent au Canada pour se reproduire.
Le système canadien
On doit obtenir un permis de baguage du gouvernement fédéral pour tout projet comportant le baguage ou le marquage d’oiseaux migrateurs. Il faut s’adresser alors au Service canadien de la faune, Ottawa, KlA OH3. Des permis délivrés par les organismes provinciaux voués à la faune peuvent aussi être exigés dans le cas du baguage d’espèces protégées par les provinces, par exemple, les éperviers, les buses et les chouettes.
Les personnes désirant obtenir un permis canadien de baguage doivent être âgées d’au moins 18 ans. Deux ornithologues qualifiés ou deux personnes détenant un permis valide de baguage doivent confirmer que le demandeur est en mesure de capturer et de manipuler les oiseaux sans les blesser, de les identifier, et de tenir des dossiers exacts et détaillés. Les demandeurs doivent également présenter une description de leur projet de baguage.
Il n’est pas nécessaire d’obtenir de permis ni de se munir de bagues du SCF pour baguer des oiseaux non migrateurs considérés comme gibier, notamment le tétras et la gélinotte, la perdrix, le colin, le lagopède, la poule-des-prairies, le faisan et le dindon sauvage. Les oiseaux d’élevage comme le pigeon, qui appartiennent à des particuliers, portent des bagues privées, qu’ils soient protégés ou non par le gouvernement fédéral ou qu’il s’agisse d’espèces domestiques ou d’oiseaux familiers.
Tous les renseignements sur le baguage et la récupération des bagues sont envoyés au Bureau de baguage des oiseaux du Canada. Ils sont à la disposition de toute personne qui en fait la demande. Des données sur les oiseaux bagués en Amérique du Nord sont disponibles à partir de 1908 dans le cas des oiseaux considérés comme gibier, et à partir de 1955 pour les oiseaux non gibier.
Ressources
Ressources en ligne
American Ornithologists’ Union (en anglais seulement)
Association of Field Ornithologists (autrefois appelée Northeastern Bird-Banding Association) (en anglais, en espagnol et en portugais seulement)
Bird Banding Laboratory (en anglais seulement)
The Bird Banding Manual (en anglais seulement)
Bureau de baguage des oiseaux du Canada
The Canadian Field-Naturalist (en anglais seulement)
Cooper Ornithological Society (en anglais seulement)
The Eastern Bird Banding Association (en anglais seulement)
The North American Banding Council (en anglais seulement)
Ontario Bird Banding Association (en anglais seulement)
Ottawa Field-Naturalists’ Club (en anglais seulement)
The Western Bird Banding Association (en anglais seulement)
The Wildlife Society (en anglais seulement)
Wilson Ornithological Society (en anglais seulement)
Ressources imprimées
GODFREY, W. E. Les oiseaux du Canada, éd. rév., Musées nationaux du Canada, réimprimé en 1989, La Prairie (Québec), Éditions Marcel Broquet, en collaboration avec le Musée national des sciences naturelles, 1986.
NATIONAL GEOGRAPHIC SOCIETY. Guide d’identification des oiseaux de l’Amérique du Nord, La Prairie (Québec), Éditions Broquet Inc., 1987.
© Sa Majesté la Reine du chef du Canada, représentée par le ministre de l’Environnement, 1987, 1991. Tous droits réservés.
No de catalogue CW66-5/1991F
ISBN 0-662-96712-7
Texte : C. Hyslop
Révision scientifique : E. Hayakawa, 1990
Photos : Service canadien de la faune