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Fédération canadienne de la fauneEnvironnement et Changement climatique Canada
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Description

Considéré comme l’un des plus lourds Strigidés de l’Amérique du Nord, le Harfang des neiges (Bubo scandiacus) mesure presque 50 cm et ses ailes déployées ont une envergure de près de 1,5 m. La femelle est plus grande et plus lourde que le mâle (2,3 kg contre 1,8 kg en moyenne) comme chez la plupart des rapaces diurnes (qui chassent le jour).

Adulte, le mâle est presque entièrement blanc. La femelle adulte est plus sombre et arbore des plumes blanches striées de brun foncé. Les jeunes des deux sexes nés dans l’année ont un plumage plus sombre que les adultes. Le mâle immature ressemble à la femelle adulte tandis que, vue de loin, la femelle immature peut paraître gris foncé tant elle est striée. La couleur claire du Harfang des neiges facilite son camouflage sur la neige, mais cet avantage disparaît en été. Quand le printemps approche et que le sol se découvre, les Harfangs se déplacent vers les amas de neige ou de glace pour s’y poser; nul ne sait vraiment s’ils le font pour se camoufler ou simplement pour éloigner les insectes ou se tenir au frais.

Une épaisse couche de duvet, recouverte de plumes abondantes, isole tout le corps du Harfang des neiges, y compris ses pattes et ses doigts, ce qui lui permet de maintenir la température de son corps entre 38 et 40 °C, même à 50 °C sous zéro. Par grand vent, le Harfang se protège en se blottissant au sol derrière des coupe-vent, comme des tas de pierres, des congères ou des balles de foin.

Harfang des neiges en vol

Harfang des neiges en vol

Les aigrettes semblables à des oreilles, caractéristiques de beaucoup de Strigidés, sont atrophiées et presque invisibles chez le Harfang des neiges, ce qui donne à sa tête son profil typiquement rond. Le bec noir est pratiquement dissimulé sous les plumes qui l’entourent. Les yeux jaunes sont encerclés de disques de plumes rigides qui réfléchissent les ondes sonores vers les oreilles situées immédiatement à l’arrière. Le sens de l’ouïe très développé chez le Harfang des neiges l’aide à déceler ses proies dans la pénombre.

Ses pattes puissantes aux griffes noires recourbées, de 25 à 35 mm de long, réduisent rapidement à l’impuissance même la proie la plus grosse.

Signes et sons

Le Harfang des neiges est un animal plutôt timide et silencieux, sauf pendant la nidification où il siffle, crie ou claque du bec pour chasser les intrus. Il n’hésite pas à piquer sur l’humain indiscret (ou même à le frapper) qui voudrait examiner son nid. Pendant la saison de reproduction, le mâle signale sa présence par un hululement puissant et n’hésite pas à s’attaquer à ses semblables aventureux.

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Habitat et habitudes

Au cours de la saison de reproduction, on trouve habituellement le Harfang des neiges depuis la limite forestière jusqu’à l’extrême nord du Canada. Il préfère les hautes toundras ondulantes avec des pointes de terre élevées pour se percher et fabriquer son nid. Dans l’Extrême-Arctique, le Harfang des neiges fabrique généralement son nid parmi des plantes comme le saule, la saxifrage, la bruyère et le lichen tandis que, dans le Bas-Arctique, il a tendance à utiliser de denses prairies bosselés à arbustes nains.

Quand il hiverne dans le sud du Canada, le Harfang des neiges affectionne les prairies, les marais, les champs ouverts ou les rivages, autant d’habitats qui lui rappellent la toundra dépourvue d'arbres de son aire de nidification. Même si certains oiseaux errent en hiver, bon nombre d’entre eux établissent un territoire de chasse qu’ils défendent pendant deux ou trois mois.

Le Harfang des neiges passe une bonne partie de son temps juché sur des piquets de clôture, des meules de foin, des arbres, des bâtiments, des poteaux électriques ou sur tout autre objet offrant une vue bien dégagée. Il surveille continuellement son territoire du haut de son perchoir, prêt à chasser un hibou importun ou à fondre silencieusement sur une souris ou une autre proie.

Caractéristiques uniques

Les yeux du Harfang ne roulent pas dans leur orbite, ce qui oblige l’oiseau à tourner la tête pour regarder sur le côté ou poursuivre un objet en mouvement. Ils renferment néanmoins plus de cellules visuelles que nos yeux et peuvent repérer de petits objets en mouvement de très loin. Comme chez les autres Strigidés, le champ de vision des deux yeux, braqués vers l’avant, se chevauche largement. Cette vision binoculaire permet aux hiboux and aux chouettes de juger très bien les distances, facteur essentiel quand vient le moment d’attaquer une proie. Contrairement à la majorité des Strigidés, qui sont nocturnes (ou actifs seulement durant la nuit), le Harfang des neiges chasse en plein jour ainsi qu’à l’aube et au crépuscule. Une telle adaptation n’est pas surprenante quand on songe que, dans le cercle arctique, le soleil ne se couche jamais pendant presque toute la période de reproduction en été.

En 1987, le Québec a choisi le Harfang des neiges comme oiseau emblème officiel de la province.

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Aire de répartition

Aire de répartition du Harfang des neiges

Aire de répartition du Harfang des neiges

Le Harfang des neiges se reproduit dans la toundra arctique de l’Eurasie et de l’Amérique du Nord. Au Canada, son aire de nidification englobe l’archipel de l’Arctique à partir de l’île d’Ellesmere, au nord, jusqu’à l'île de Baffin, à l’est, l’île Banks, à l’ouest, et tout le long de la côte nord du Yukon jusqu’au Labrador.

En hiver, il gagne diverses régions du sud du Canada, permettant ainsi à bon nombre de Canadiennes et de Canadiens d’observer l’un des Strigidés les plus impressionnants et les plus remarquables parmi les plus de 200 espèces qui existent dans le monde. Quelques individus hivernent dans la région où ils nichent. Ainsi, on a observé le Harfang vers le milieu de l’hiver jusqu’à 82° de latitude nord sur l’île d’Ellesmere, où la nuit polaire dure 24 heures. Le Harfang des neiges migre aussi vers des lieux situés plus au sud, généralement au début de novembre. Il visite même régulièrement certaines régions de son aire d’hivernage (les prairies de l’Ouest canadien et les zones non boisées du sud de l’Ontario et du Québec, ainsi que dans les régions limitrophes du nord des États-Unis), bien que le nombre d’oiseaux varie d’une année à l’autre.

On le voit moins fréquemment dans les autres sites d’hivernage, le long de la côte du Pacifique au Canada et dans le nord des États-Unis ou dans les provinces de l’Atlantique et les États de la Nouvelle-Angleterre. Dans ces régions, on peut observer de nombreux Harfangs des neiges au cours d’un hiver sans en revoir un seul pendant plusieurs années. Habituellement, ce sont les oiseaux nés dans l’année qui préfèrent ces secteurs moins fréquentés par leurs semblables adultes. Le Harfang des neiges a été aperçu jusque dans le centre de la Californie, au Texas et en Géorgie, mais ces observations sont exceptionnelles.

Autrefois, on croyait que le Harfang des neiges migrait périodiquement, à savoir tous les trois ou quatre ans, lorsque la population des lemmings de l’Arctique atteignait un creux. Toutefois, des analyses récentes des Recensements des oiseaux de Noël indiquent que le nombre de Harfangs des neiges qui hivernent dans diverses régions de l’Amérique du Nord varie de façon irrégulière d’année en année. Certains Harfangs des neiges peuvent également migrer entre la Russie et le Canada.

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Alimentation

Bien qu’il soit assez rapide pour attraper des canards au vol, le Harfang des neiges préfère les petits mammifères. Dans l’Arctique, il mange des lièvres arctiques, des lagopèdes, des renards ou des oiseaux de mer lorsqu’ils sont disponibles, mais son mets favori demeure le lemming (genres Lemmus et Dicrostonyx). Ces rongeurs, qui ressemblent à de gros campagnols des champs, sont très prolifiques et leurs populations atteignent rapidement un sommet jusqu’à l’épuisement des réserves alimentaires. La famine, la maladie et les prédateurs déciment alors les lemmings si bien qu’ils semblent sur le point de disparaître. Ensuite, les populations de lemmings récupèrent peu à peu jusqu’à une nouvelle explosion démographique, trois ou quatre ans plus tard. Ce cycle s'observe sur de grandes étendues de la toundra d’une superficie pouvant atteindre jusqu’à 2 500 km2, ce qui a de lourdes conséquences sur la reproduction des Harfang des neiges dans ces régions.

En hiver, le Harfang des neiges se nourrit principalement de petits rongeurs, surtout des campagnols des champs (Microtus pennsylvanicus) et des souris à pattes blanches ou sylvestres (du genre Peromyscus).  Les Harfang qui passent l’hiver près des silos à céréales ou des dépotoirs peuvent vivre presque exclusivement de rats. Toutefois, le Harfang des neiges est un chasseur opportuniste et se nourrit de mammifères dont la taille varie de la musaraigne au lièvre et d'oiseaux allant du bruant au canard et au faisan.

La capture survient habituellement au terme d’un vol court partant du perchoir, mais le Harfang chasse également en vol, surtout dans la toundra arctique plate, en se déplaçant lentement de 10 à 15 m au-dessus du sol, prêt à piquer sur une proie intéressante.

Comme les autres oiseaux de proie, le Harfang des neiges avale ses petites proies tout entières. Des sucs gastriques très puissants dissolvent la chair tandis que les os, les dents, la fourrure et les plumes indigestes sont comprimés en boulettes ovales que l’oiseau régurgite de 18 à 24 heures plus tard. La plupart du temps, le Harfang régurgite du haut de son perchoir favori, au pied duquel on peut trouver des dizaines de boulettes. Les biologistes les analysent souvent pour déterminer la quantité et le type de proies consommées. Dans le sud du Canada, ces boulettes renferment très souvent la fourrure et les os de campagnols des champs et d’autres souris. Chaque oiseau doit capturer de 7 à 12 souris par jour pour combler ses besoins.

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Reproduction

Le Harfang des neiges, qui hiverne dans le sud du Canada et dans le nord des États-Unis, reprend le chemin du Nord en février ou en mars vers son aire de nidification dans l’Arctique. Les couples ou les petits groupes se forment parfois à cette occasion et on peut voir jusqu’à 20 Harfangs perchés à quelques centaines de mètres les uns des autres. La majorité d’entre eux ont quitté leur aire d’hivernage en avril.

Les Harfangs retrouvent leurs sites de nidification avant que la toundra se soit débarrassée de sa couverture neigeuse. Chaque couple occupe un territoire de 1 à 2 km2 de superficie. La parade nuptiale commence au début de mai. Le mâle vole en battant exagérément des ailes et marche très droit sur le sol, devant la femelle, les ailes partiellement déployées. Il tient souvent un lemming mort dans son bec durant ces démonstrations.

Le nid se résume à une petite dépression pratiquée dans le sol par la femelle et garnie de quelques-unes de ses plumes et d’un peu d’herbe ou de mousse. Il est de préférence situé sur une butte, une petite colline ou un autre endroit surélevé. Il s’agit en effet des seuls endroits dépourvus de neige quand débute la nidification et ils ont l’avantage d’offrir une vue bien dégagée des alentours.

La reproduction du Harfang des neiges est intimement liée aux fluctuations des populations de lemmings dans les régions où il dépend de cette source de nourriture. Quand les lemmings abondent, le Harfang pond jusqu’à 11 ou 12 œufs par couvée (ensemble d’œufs). Quand ils se font rares, la couvée se limite entre 4 et 7 œufs. Lorsqu'une population locale de lemmings s'effondre, il arrive que le Harfang ne niche pas du tout ou qu’il se déplace de 50 à 100 km pour trouver un autre endroit où ils abondent.

La femelle reste seule à couver (ou réchauffer) les œufs et à protéger les oisillons en s’asseyant sur eux. Comme il gèle souvent au début de la nidification, elle doit les couver presque continuellement. C’est alors son compagnon qui la nourrit, en capturant et en lui apportant des lemmings au nid. Le mâle se charge aussi de trouver la majeure partie de la nourriture des oisillons durant leurs premières semaines.

La femelle pond habituellement un œuf tous les deux jours jusqu’à la fin de la ponte, mais l’incubation débute dès la ponte du premier œuf. Les oisillons éclosent généralement en juillet, à intervalles d’environ 48 heures après une incubation de 32 à 34 jours. On trouve donc dans le nid des oisillons dont l’âge et la taille varient considérablement. Même si cette éclosion échelonnée résulte de la nécessité de commencer l’incubation dès la ponte du premier œuf, elle permet également d’ajuster la taille de la couvée à la quantité de nourriture disponible. En effet, si les adultes ne parviennent pas à nourrir suffisamment tous les oisillons, les plus jeunes et les plus petits, qui ne peuvent pas se mesurer à leurs frères et sœurs plus gros, finissent par mourir de faim.

Les oisillons qui viennent d’éclore sont recouverts d’un duvet blanc, mais à celui-ci s’ajoute vite un duvet gris foncé qui les fait paraître presque noir à l'âge de 10 jours. Les jeunes Harfangs quittent le nid dès l’âge de trois ou quatre semaines, bien avant de pouvoir voler. Ils se dispersent autour du nid, mais continuent d’être fidèlement nourris par leurs parents. Les jeunes sont voraces et il faut environ 120 kg de nourriture, soit près de 1 500 lemmings adultes, pour alimenter une couvée de neuf oisillons jusqu’à ce qu’ils soient en mesure de se débrouiller seuls. Le premier envol survient à l’âge de sept ou huit semaines, quand le duvet foncé a été remplacé par le plumage immature. Le court été de l’Arctique tire alors à sa fin et les jeunes Harfangs devront entreprendre sous peu leur première migration.

 

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Conservation

Le Harfang des neiges a peu de prédateurs. Durant la période de nidification, les œufs et les oisillons laissés sans protection peuvent être attaqués par des labbes (oiseaux prédateurs au vol rapide, parents des mouettes) ou par le renard arctique. Toutefois, l’adulte sait se montrer vigilant et est bien armé pour repousser ces attaques.

Même si le milieu dans lequel il vit est particulièrement rigoureux, en été comme en hiver, le Harfang des neiges s’y est magnifiquement adapté. Bien sûr, une pénurie de nourriture est toujours à craindre mais, par sa mobilité, l’oiseau aura vite fait de trouver une région où la nourriture est abondante. Quoique la famine soit responsable de la mort de certains Harfangs immatures et inexpérimentés qui s’éloignent de leur aire normale d’hivernage, c’est sans doute l’être humain qui laisse planer la plus grande menace sur ceux qui passent l’hiver dans les régions habitées. La collision en vol avec des lignes électriques, des clôtures de fil de fer barbelé, des automobiles ou diverses structures est une cause importante de mortalité chez les Harfangs des neiges qui hivernent dans le sud du Canada. Autrefois, les chasseurs tuaient des Harfangs durant leurs vols en provenance de l’Arctique. Même si l’on en abat encore quelques-uns illégalement en hiver, la majorité des gens se contentent maintenant d’observer ou de photographier ces oiseaux imposants et mystérieux.

Des règlements provinciaux et territoriaux interdisent la chasse du Harfang des neiges dans toutes les régions du pays. Le baguage à des fins scientifiques (méthode qui consiste à suivre les oiseaux en posant des bagues numérotées en aluminium sur leurs pattes) exige des permis spéciaux du gouvernement fédéral et des provinces. Environnement Canada subventionne des projets sur l’écologie de l’Arctique qui comprennent l’étude des Harfangs des neiges. Par exemple, des travaux effectués sur l’île de Bylot, au Nunavut, ont permis d’étudier les rapports entre le Harfang des neiges, l’Oie des neiges, le renard arctique et les lemmings. Ces travaux ont également permis de montrer que l’Oie des neiges, en établissant ses sites de nidification à proximité des Harfangs des neiges, profite de leur protection contre d’autres prédateurs comme le renard. Par ailleurs, Environnement Canada a aussi contribué à des recherches sur la biologie du Harfang en hiver.

Le Harfang des neiges constitue un maillon important dans la chaîne alimentaire de l’écosystème de la toundra et illustre admirablement bien une adaptation morphologique et comportementale complexe aux conditions très rigoureuses de cet environnement. Durant ses séjours dans le Sud, le Harfang des neiges peut jouer un rôle utile dans la limitation naturelle des populations de rongeurs des régions agricoles.

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Ressources

Ressources en ligne

Cornell University Laboratory of Ornithology (en anglais seulement)

Ressources imprimées

PARMELEE, DAVID. 1992. « Snowy Owl », dans A. Poole, P. Stettenheim et F. Gill, dir., The Birds of North America, no 10, Philadelphie, The Academy of Natural Sciences, et Washington (DC), The American Ornithologists’ Union.

© Sa Majesté la Reine du chef du Canada, représentée par le ministre de l’Environnement, 1974, 1979, 1980, 1991, 2007. Tous droits réservés.

Texte : Ronald D. Weir
Révision scientifique : M. Ross Lein, en 1989; Mark Mallory, en 2006
Photos : Gordon Court

Version imprimée
No de catalogue CW69-4/46-2006F
ISBN 0-662-71803-8

Version PDF
No de catalogue CW69-4/46-2006F-PDF
ISBN 978-0-662-07403-8