Le Grand Corbeau
Cet oiseau...
Le Grand Corbeau (Corvus corax) est l’un des passériformes les plus lourds, et le plus imposant des oiseaux chanteurs. On le reconnaît facilement à sa taille – longueur de 54 à 67 cm, envergure d’ailes de 115 à 150 cm, poids de 0,69 à 2 kg – et à son plumage noir lustré pourpre ou violet. Son cou est recouvert d’une collerette de plumes et son bec est large et robuste. En plein vol, on aperçoit sa queue cunéiforme (en forme de coin, ou de V) garnie de longues plumes au centre. Tandis que les femelles sont un peu plus petites, les deux sexes se ressemblent énormément. La taille d’un corbeau adulte peut aussi varier selon son habitat, les sous-espèces des régions plus froides étant souvent plus grosses.
On confond souvent le Grand Corbeau avec la corneille d’Amérique dans le sud du Canada et les États-Unis. Les deux oiseaux de couleur semblable sont du même genre : ordre des passériformes, famille des corvidés (geais, pies, cassenoix, etc. ) et genre corvus. Mais la corneille d’Amérique est plus petite – son envergure est d’environ 75 cm – et sa queue en forme d’éventail au vol n’a pas de plumes plus longues au centre. Son bec est aussi plus étroit que celui du corbeau et elle n’a pas de plumes de cou. Le cri des deux oiseaux est également différent – le corbeau pousse un profond croassement, alors que la corneille émet un cri plus aigu. Et, finalement, le corbeau a tendance à vivre seul ou en paire, tandis que les corneilles se retrouvent souvent en grands groupes.
Signes et sons
- Le cri le plus fréquemment émit par le Grand Corbeau est un croassement rauque. Or, c’est un oiseau très vocal. Il peut produire toute une série de cris et de sons, et ce, pour diverses raisons : cri d’alarme et de chasse, sons de bien-être et exclamations de protection du territoire. Le Grand Corbeau peut aussi reproduire les sons qu’il entend dans son habitat, bien qu’on ne comprenne pas encore très bien pourquoi il a acquis cette capacité.
-Le Grand Corbeau communique également au moyen de gestuelles, utilisant son bec, ses ailes et même son col de plumes au cou. Les comportements combatifs ou de lissage peuvent être exhibés entre paires, envers les intrus ou même pour afficher sa soumission devant un corbeau dominant. -Le corbeau est un oiseau très intelligent. Le rapport entre le poids cérébral (du cerveau) et le poids corporel des corvidés est parmi le plus important chez les oiseaux. En effet, ce ratio équivaut à celui des grands singes et des cétacés, et n’est que légèrement inférieur à celui des humains. Le corbeau semble capable d’appliquer des solutions à de nouveaux problèmes et peut même utiliser des outils au besoin. Vif opportuniste, il se perche ou plane dans le ciel pour observer et apprendre. Il peut aussi transmettre ses connaissances à d’autres corbeaux. -Les groupes de grands corbeaux affichent des dynamiques sociales complexes qui comprennent des comportements typiques d’oiseaux dominants et soumis. Les jeunes vivent en groupes, mais les adultes sont extrêmement territoriaux et préfèrent évoluer seuls ou en paires. Des corbeaux de différents âges peuvent se rassembler pour fourrager dans des endroits où les ressources sont concentrées. -On a parfois observé des corbeaux qui jouaient ensemble, qui se jouaient des tours ou qui jouaient des tours à d’autres animaux. -Le corbeau adulte n’est pas souvent victime de prédateurs, mais de jeunes corbeaux maladroits peuvent être la proie d’aigles, d’autres corbeaux, de hiboux ou de martres si leurs parents ne les surveillent pas attentivement. Le nid peut aussi faire l’objet d’une attaque, mais les corbeaux, parents attentifs et protecteurs, réussissent habituellement à le protéger.
Le Grand Corbeau est un des oiseaux les plus cosmopolites de la planète! On le retrouve partout dans l’hémisphère nord. Il est généraliste dans son choix d’habitat. Il peut habiter dans la forêt ou la brousse, sur un escarpement rocailleux sur une côte ou une montagne, dans la toundra, les prairies et même le désert. Il a tendance à éviter les grandes villes et préfère se limiter aux petites villes ou aux villages.
Le plus répandu des corvidés, le Grand Corbeau se retrouve partout dans l’hémisphère nord. C’est une espèce sédentaire qui reste dans la même région toute l’année, bien que les populations les plus au nord puissent se déplacer vers le sud pour l’hiver. L’espèce si divise en huit sous-espèces ayant de légères différences selon leur habitat. En Amérique du Nord (Canada et nord des États-Unis) et dans le Groenland, on retrouve la sous-espèce Corvus corax principalis. Cette dernière habite partout au Canada, sauf dans le sud des Prairies, d’où elle a été extirpée, ou dans les régions les plus populeuses du sud de l’Ontario.
Puisque le corbeau peut s’adapter à une gamme d’habitats, son alimentation est aussi variée. En effet, un corbeau se nourrira d’à peu près tout ce qu’il peut trouver! C’est un omnivore opportuniste consommant surtout des matières animales, mais aussi des matières végétales s’il le faut. Il attaquera des oiseaux adultes et niais, se gavera d’œufs, de petits mammifères, de plus gros mammifères vieux ou malades, d’amphibiens, de reptiles, de poissons et d’invertébrés. Il récupérera aussi des carcasses et des déchets humains. Le corbeau trouve habituellement sa nourriture sur le sol, sauf s’il s’agit d’œufs ou de jeunes oiseaux. Il peut parfois conserver des portions qu’il mangera plus tard. Le Grand Corbeau a tendance à chasser en couple à l’intérieur de son territoire. Les groupes de jeunes peuvent à l’occasion pousser des cris bruyants pour signaler une carcasse aux adultes. Le corbeau peut aussi travailler avec d’autres espèces pour se nourrir : lorsqu’il voit un gros animal, il hurle pour avertir les loups de sa présence. Une fois que les loups ont fini d’attaquer et de manger leur proie, le corbeau se nourrit des restes.
Le Grand Corbeau atteint la maturité sexuelle, ou l’âge adulte, vers trois ans. À cet âge, il trouve une compagne grâce à des rites compliqués et s’accouplera à vie. Durant la parade nuptiale, le mâle peut faire des acrobaties en plein vol pour impressionner la femelle. Une fois la paire accouplée, les deux oiseaux se perchent ensemble, se frottent les becs et se lissent les plumes. Le couple choisit ensuite un territoire où il passera la majorité de son temps, et ce, pendant et après la période de reproduction. La taille du territoire varie selon la densité des ressources (nourriture et abris) disponibles dans la région. Par exemple, le territoire sera de plus grande superficie sur une vaste étendue de terre aride et réduit dans une forêt luxuriante. Le mâle et la femelle participent tous les deux à la construction du nid, habituellement sur une large branche d’arbre, un escarpement ou une structure humaine comme un poteau électrique, un pont, un pylône radio ou un immeuble. Le nid ressemble à un gros panier fait de brindilles. L’intérieur est garni de matières plus douillettes, dont des racines, des herbages et de la fourrure. Le même nid peut servir plusieurs années, le couple y ajoutant des matériaux pour l’entretenir.
Le Grand Corbeau se reproduit une fois par année. Une couvée peut comporter de quatre à sept œufs verdâtres à taches olive ou brunes. La femelle dans le sud pondra ses œufs à partir du mois de février, et la femelle dans le nord en avril. C’est la femelle qui couve les œufs pendant trois semaines. Comme elle ne peut pas fourrager durant cette période, le mâle lui apportera sa nourriture. Une fois les oisillons éclos, les deux parents se chargent de les nourrir et de s’en occuper. Les petits quitteront le nid cinq à six semaines après leur naissance pour former des groupes avec d’autres jeunes corbeaux.
Le corbeau revêt une grande importance pour les peuples autochtones du Canada et figure dans leurs mythes, légendes et traditions. Les Autochtones de la côte britanno-colombienne lui accordent une importance particulière; pour eux, il symbolise la création, la connaissance et le prestige. Le corbeau est aussi un messager, un filou, un enseignant, un guérisseur et un esprit guide. Les Inuits le considèrent comme le Créateur de toute la vie, et il occupe une place d’honneur sur les totems de plusieurs clans. Tandis que les peuples autochtones voyaient le corbeau comme un allié, ce ne fut pas le cas pour la majorité des Européens arrivant en Amérique du Nord. À partir du milieu des années 1600 jusqu’au milieu des années 1900, les craintes et les superstitions ont fait en sorte que le corbeau soit éliminé de certaines régions du nord et du centre de l’Europe. C’est aussi ce qui arriva dans l’est et le centre-ouest de l’Amérique du Nord jusqu’en 1900, alors qu’on croyait qu’il nuisait aux cultures et aux animaux d’élevage. Dans ces régions, le corbeau était capturé, empoisonné ou tiré. L’espèce est encore largement absente des Prairies du sud du Canada partiellement en raison de ces tueries. Mais sa grande adaptabilité a permis aux populations de corbeaux de se rétablir depuis 40 ans un peu partout en Amérique du Nord, même dans les régions d’où il a été chassé il y a cent ans. Or, la victoire n’est pas gagnée, car nous ne savons pas comment l’espèce réagira aux nouvelles menaces (changement climatique et destruction d’habitats, par exemple). Espèce fascinante et étroitement liée aux Autochtones du Canada, le corbeau mérite d’être conservé. Il joue un rôle important dans nos écosystèmes. Il contribuant et au contrôle des populations de proies et au cycle nutritif grâce à sa diète de charogne. En apprenant à mieux connaître le corbeau et en dissipant sa sombre réputation, nous prenons un premier pas en ce sens!
https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/corbeau-symbolisme-du
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