Description
Le bec conique court et fort du Chardonneret jaune, Carduelis tristis, en fait un représentant type des oiseaux granivores de l’Amérique du Nord, membres de la famille des fringillidés. Le Chardonneret jaune mesure environ 11 cm, donc à peu près la même taille que le Moineau domestique, et pèse environ 11 g.
Au printemps, le Chardonneret jaune mue, c.-à-d. se dépouille de son plumage pour le remplacer par un autre, à l’exception des plumes noires des ailes et de la queue, et son bec tourne à l’orangé. La livrée du mâle devient alors jaune serin, et sa tête se pare d’une calotte d’un noir éclatant. Au vol, son croupion blanc fait contraste avec sa queue noire. Quant à la femelle, son plumage d’été est jaune olive, avec du jaune sur le cou et la poitrine.
Après une mue complète à l’automne, le plumage devient presque identique pour les deux sexes, chamois en dessous et brun olivâtre sur le dessus. Les ailes sont noires avec des barres blanches, et la queue, elle aussi noire, est bordée de blanc à son extrémité. La tête et le cou sont jaune pâle, et il ne subsiste plus que de légères traces du jaune éclatant du plumage d’été. Les petites sus-alaires (les plumes qui recouvrent les « épaules ») du mâle sont jaunes.
Au cours de leur premier automne et hiver, les jeunes sont brun clair sur le dessus avec des barres alaires chamois plutôt que blanches, et les épaules sont d’un noir mat, ce qui les distingue des adultes.
On rencontre parfois en Colombie-Britannique un oiseau qui ressemble au Chardonneret jaune; il s’agit du Chardonneret mineur Carduelis psaltria. Celui-ci est légèrement plus petit, soit environ 10 cm. En été, le mâle adulte est noir ou olive sur le dessus, plutôt que jaune, et il conserve la calotte noire toute l’année. La femelle a un croupion olive plutôt que pâle.
Signes et sons
Au printemps ou à l’été, le Chardonneret jaune est un oiseau qui se reconnaît facilement à sa livrée jaune vif et à son vol onduleux entrecoupé de pèr-tchi-co-ri, pèr-tchi-co-ri.
Lorsque le mâle accompagne la femelle à la recherche de matériaux pour construire le nid, il se perche tout près et chante afin d’attirer l’attention de sa compagne. Au premier signe de danger, l’un ou l’autre des partenaires fera entendre un sifflement souit ou un cri bèrbi, bèrbi, bi, bèrbi.
Pendant que la femelle couve, c.-à-d. réchauffe, les oeufs, elle dépend de son compagnon pour se nourrir. Lorsque le mâle survole le nid en faisant des signaux visuels et en lançant de petits cris, l’śsophage rempli de graines, la femelle lui répond par des tîtîtîtîtî doux et ininterrompus.
Peu de temps avant d’apprendre à voler, les jeunes commencent à émettre un cri juvénile qui ressemble à tchic-ki ou tchic-oui. Ils émettent ce son pendant le premier mois après leur départ du nid jusqu’à ce qu’ils soient complètement indépendants.
Haut de la pageHabitat et habitudes
Il préfère les arbres en terrain découvert tout particulièrement dans les vergers et le long des routes. Sauf pendant la période de nidification, le Chardonneret jaune est un oiseau sociable qui recherche la compagnie de ses semblables pour se nourrir et se déplacer. En hiver, il se mêle à ses cousins, les sizerins et les Chardonnerets des pins, se nourrissant dans les champs herbeux et les vergers situés près des régions boisées.
Caractéristiques uniques
De nombreux chercheurs se sont demandés pourquoi le Chardonneret jaune se reproduisait si tard dans l’année, soit de juillet à septembre. Certains ont proposé que le moment de la reproduction est relié à l’habitude peu commune de l’oiseau de muer, c.-à-d. que le Chardonneret jaune est le seul membre des Carduélinés à acquérir son plumage nuptial à la suite d’une mue. Chez la plupart des oiseaux de cette famille, les plumes s’usent peu à peu avec le temps, donnant comme résultat une apparence transformée au moment de la période de reproduction. Étant donné qu’il est inhabituel d’observer une mue prolongée chez un oiseau de la zone tempérée, on a avancé qu’il s’agissait peut-être là du seul moyen qu’ait trouvé cet oiseau au régime granivore hypoprotéique d’accumuler suffisamment d’énergie pour la reproduction. Ainsi, il se peut que ce soit la fin de la mue, plutôt que la quantité de nourriture disponible, qui détermine le moment de la reproduction, même si l’abondance des graines à la fin de l’été peut constituer un facteur important pour les parents qui peuvent ainsi compter sur des réserves plus grandes, qu’en mai ou en juin, pour nourrir les jeunes.
Aire de répartition
Le Chardonneret jaune, niche dans le Sud du Canada, de la Colombie-Britannique à l’île de Terre-Neuve, et dans la majeure partie des États-Unis se trouvant au nord des États du golfe du Mexique. À l’approche de l’hiver, il se déplace sur de courtes distances vers le sud. Son aire d’hivernage comprend le Sud de la Colombie-Britannique, du Manitoba, de l’Ontario, du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Écosse ainsi que la plupart des États américains.
Alimentation
Le Chardonneret jaune a un régime varié. Principalement granivore, il bénéficie d’une abondance de nourriture pendant la plus grande partie de l’année : graines de chardon, de pissenlit, d’ambroise, de molène, de cosmos, de salsifis, de tournesol et d’aulne.
Dans son aire d’hivernage, il est facile d’attirer un Chardonneret jaune à une mangeoire. Il préfère les mangeoires cylindriques suspendues munies de perchoirs. On peut les remplir de graines de tournesol ou, mieux encore, de chardon commercial ou guizotia, une graine importée d’Afrique. Il se pose aussi volontiers sur les plateaux fixés aux fenêtres ou installés dans la cour, où il peut se nourrir de sorgho, de millet, d’alpiste, de noix hachées et de graines de tournesol.
Avant une tempête, les oiseaux se nourrissent d’une manière frénétique aux mangeoires et montre un gain de poids significatif avant et pendant la tempête. Ce comportement peut accroître les chances du Chardonneret jaune de survivre à des conditions climatiques difficiles.
Certains fringillidés ne se servent pratiquement pas, ou même pas du tout, de leurs pieds pour se nourrir, mais le Chardonneret jaune s’en sert beaucoup. Il peut par exemple se poser sur une grappe de capsules contenant des graines au sommet d’une onagre et s’agripper à la tige de manière à pouvoir délicatement en extraire les graines. Au printemps, les chatons qui pendent aux bouleaux et aux aulnes sont arrachés avec le bec et serrés contre la branche avec les doigts. Grâce à son habileté et à son poids minime, le Chardonneret jaune peut tirer profit de sources d’alimentation relativement inaccessibles à d’autres compétiteurs potentiels. À l’occasion, il mange aussi des insectes, notamment des pucerons et des chenilles, et il extirpe des larves des galles et des fruits.
Haut de la pageReproduction
Au printemps, le début de la parade nuptiale est observé au moment où un ou plusieurs mâles se mettent à pourchasser une seule femelle. La femelle vole en zigzaguant tandis que le mâle peut se mettre soudainement à voler d’une manière lente et rectiligne. Pendant la parade, les couples décrivent des cercles, et le mâle gazouille pendant tout le vol. L’accouplement a lieu à la fin de l’été, et c’est aussi à ce moment-là que le nid est construit.
Le mâle délimite son domaine en gazouillant et en voltigeant d’une branche à l’autre autour du périmètre de son territoire. De plus, il décrit des cercles et vole de deux façons différentes : tantôt d’une manière lente et rectiligne, tantôt en exagérant son vol ondulé habituel. Dans ce dernier cas, il replie les ailes très près du corps, plonge vers le sol et redéploie ensuite les ailes pour remonter en exécutant une longue série de boucles.
Deux ou trois couples peuvent occuper des territoires adjacents et former un genre de colonie. Il se peut que ce regroupement aide à échanger l’information sur les sources d’alimentation et à se défendre contre les prédateurs. On observe une plus forte densité de nids là où il y a abondance de nourriture et d’eau.
À la fin de l’été, la femelle construit son nid dans les branches terminales d’un buisson ou d’un arbre, à une hauteur pouvant atteindre 10 m. Les travaux s’effectuent par à-coups de 10 à 40 minutes au cours desquels les matériaux requis sont apportés et déposés à l’endroit choisi. Les périodes d’inactivité peuvent se prolonger pendant des heures ou des jours.
Pour construire l’extérieur du nid, la femelle arrache des fibres d’arbres morts, de mauvaises herbes et de lianes, et se sert aussi de chatons et d’herbes. Elle défait parfois les nids d’autres oiseaux afin de se servir de ces matériaux pour construire le sien. Elle renforce le pourtour du nid avec des bandes d’écorce maintenues en place à l’aide de la soie collante des araignées ou des chenilles. L’intérieur du nid est garni de duvet de chardons, d’asclépiades et de typhacées et a un diamètre d’environ 6,5 cm.
Le mâle accompagne généralement la femelle lorsqu’elle part à la recherche de matériaux de construction. Il l’aide parfois à transporter les matériaux nécessaires, mais c’est la femelle qui s’occupe de la construction comme tel du nid.
Il s’écoule en moyenne huit jours entre le début de la construction du nid et la ponte du premier œuf. Le Chardonneret jaune pond de quatre à six oeufs d’un blanc bleuté et de la taille d’une arachide. Pendant que la femelle les couve, elle est nourrie par son partenaire. Ce dernier, l’œsophage rempli de graines, survole le nid en lançant des petits cris. La femelle affamée lui répond par des tîtîtîtîtî doux et ininterrompus. Parfois, la femelle quitte le nid pour recevoir la becquée. En d’autres occasions, le mâle se perche sur le bord du nid, introduit le bec de sa compagne dans le sien et la nourrit comme s’il s’agissait d’un jeune.
Après environ 13 jours d’incubation, les jeunes naissent recouverts d’un duvet gris. Leurs yeux commencent à s’ouvrir après trois jours. Ils ne deviennent vraiment actifs qu’au cours de la deuxième semaine; ils se disputent alors bruyamment la nourriture que leur apportent leurs parents à intervalles espacés. Cette nourriture consiste en une masse de graines non digérées, retenues ensemble par du mucus et régurgitées par les adultes dans leur bouche.
Au début, les adultes retirent du nid les sacs fécaux, c.-à-d. les excréments des jeunes, mais ces derniers apprennent plus tard à éliminer au-dessus du bord du nid, ce qui contribue à former un revêtement sur la couche extérieure. Les oisillons se développent rapidement; lorsqu’ils quittent le nid, soit de 11 à 15 jours après leur éclosion, ils sont couverts de leur plumage juvénile jaune olivâtre.
Peu de temps avant de quitter le nid, ils commencent à émettre un cri juvénile qui ressemble à tchic-ki ou tchic-oui. Un premier jeune se hisse tant bien que mal hors du nid, va se percher sur une branche située tout près et essaye timidement ses ailes sur de courtes distances. Les autres ne tardent pas à suivre. La femelle peut alors commencer la construction d’un nouveau nid pour une seconde nichée. C’est le mâle qui se charge de nourrir les jeunes oiseaux, et c’est leur cri juvénile qui lui permet alors de les trouver. À l’âge d’un mois, les jeunes sont autonomes et ne lancent plus ce cri.
Conservation
Divers prédateurs s’attaquent au Chardonneret jaune et à ses oeufs, notamment les chats, belettes, serpents, écureuils, geais, Éperviers bruns et Éperviers de Cooper. Il arrive aussi que le Chardonneret jaune meure accidentellement en s’accrochant dans les plantes du type bardane (ou artichaut, comme on dit au Canada francophone) ou dans une toile d’araignée.
Le Vacher à tête brune a l’habitude de déposer ses oeufs dans les nids d’oiseaux chanteurs plus petits que lui, comme le Chardonneret jaune. Toutefois, la plupart des jeunes vachers mourront parce que le régime à base de graines des oiseaux chanteurs ne suffit pas à satisfaire leurs besoins alimentaires. Il est cependant vrai que la présence du vacher diminue les chances de mener à terme une couvée de chardonnerets.
Les populations d’oiseaux, notamment de Chardonnerets jaunes, fluctuent continuellement au gré des changements que subissent leur environnement. Le Relevé des oiseaux nicheurs (BBS) du Canada nous donne une idée de la population de la plupart des espèces communes d’oiseaux. Dans ce relevé, on considère que le Chardonneret jaune est un oiseau « commun », mais les résultats indiquent un déclin des populations de couples reproducteurs dans les Maritimes, dans le centre et le Sud de l’Ontario et du Québec, et dans le centre des Prairies, de 1966 à 1983. Le BBS réalisé aux États-Unis a aussi démontré une diminution de la population de cette espèce au rythme moyen de 4 p. 100 par année. Ce déclin peut s’expliquer en partie par la destruction des habitats propices à la reproduction, résultant de l’évolution des pratiques agricoles et de l’expansion des centres urbains.
Les données du Recensement des oiseaux de Noël, relevé effectué en hiver, indiquent une augmentation du nombre de Chardonnerets jaunes qui passent l’hiver dans nos régions. Les résultats du BBS et du Recensement des oiseaux de Noël ne sont pas nécessairement contradictoires. En effet, l’accroissement de la population pendant l’hiver peut être dû à l’installation d’un plus grand nombre de mangeoires, tandis que la population totale peut continuer à diminuer. Pour comprendre ces fluctuations des effectifs, il est essentiel de surveiller et d’étudier les facteurs qui entrent en jeu.
Ressources
Ressources en ligne
Cornell University Laboratory of Ornithology (en anglais seulement)
Ressources imprimées
GODFREY, W. E. Les oiseaux du Canada, éd. rév., Musées nationaux du Canada, réimprimé en 1989, La Prairie (Québec), Éditions Marcel Broquet, en collaboration avec le Musée national des sciences naturelles, 1986.
© Sa Majesté la Reine du chef du Canada, représentée par le ministre de l’Environnement, 1987. Réimprimé avec corrections en 1993. Tous droits réservés.
No de catalogue CW69-4/70-1987F
ISBN 0-662-94264-4
Texte : E. Hayakawa
Révisé par E. Hayakawa, 1994
Photo : Tony Beck