Description
Photo: iStockphoto.com
Le trait le plus distinctif du raton laveur (Procyon lotor) est certainement son masque noir qui lui donne un air espiègle. Les ratons laveurs sont habituellement de couleur grisâtre, et leur queue comporte de cinq à dix anneaux tantôt noirs tantôt bruns. La couleur de leur corps peut toutefois varier du blanc (albinisme) au noir (mélanisme) ou brun. La mue (changement de pelage) annuelle commence au printemps et dure environ trois mois.
La tête est large, le museau pointu et les oreilles courtes et arrondies (de 4 à 6 cm). Les yeux sont noirs. Le corps et la queue mesurent au total 80 cm en moyenne chez les adultes, la taille des mâles étant habituellement de 25 p. 100 supérieure à celle des femelles. Les ratons laveurs des latitudes nordiques tendent à être plus lourds (entre 6 et 8 kg) que leurs congénères des régions méridionales (4 kg). Toutefois, on a observé des adultes pesant jusqu’à 28 kg à l’automne.
Habitat et habitudes
Le raton laveur peut vivre dans toute une gamme d’habitats. Il ne semble avoir besoin que d’une source d’eau, de nourriture et d’un gîte. Il préfère les bois de feuillus marécageux, les forêts des plaines inondables, les marais salés et les marais d’eau douce, et les terres agricoles cultivées ou abandonnées. Dans les prairies, il optera le plus souvent pour les boisés et les terres humides. Très adaptable, il se rencontre aussi fréquemment dans de nombreuses villes d’Amérique du Nord.
Les déplacements et le territoire du raton laveur varient beaucoup selon l’habitat, la densité de population et les sources d’alimentation. Le territoire représente la superficie où l’animal trouve nourriture, eau et abri au cours de ses déplacements quotidiens. Dans les secteurs agricoles de l’Est de l’Amérique du Nord, le territoire du raton laveur varie entre 1 et 4 km2 alors qu’il peut atteindre 50 km2 dans les prairies. À l’opposé, on a établi qu’il couvrait moins de 0,1 km2 en milieu urbain. Habituellement, ces superficies se chevauchent et on a observé peu de comportements territoriaux, particulièrement dans les villes.
La densité des populations varie elle aussi beaucoup selon le type d’habitat. Ainsi, on estime que les milieux agricoles abritent souvent de cinq à dix ratons laveurs au kilomètre carré, tandis qu’on a déjà noté une densité exceptionnelle de 100 individus au kilomètre carré en milieu urbain. Toutefois, une densité d’à peine un animal au kilomètre carré s’observe parfois dans les prairies.
Dans le Nord des États-Unis et le Sud du Canada, le cycle biologique annuel du raton laveur comprend une période de reproduction à la fin de l’hiver et au début du printemps, une période de croissance et d’engraissement pendant l’été et l’automne, et une période d’engourdissement hivernal. Plus au sud, on n’observe cet état de torpeur hivernale que par mauvais temps.
rsquo;engourdissement hivernal permet au raton laveur de conserver son énergie sous forme de réserves de graisse en période de disette. Il s’agit d’une période d’inactivité plutôt que d’une véritable hibernation. La température du corps ne baisse pas et la température ambiante semble régir l’activité de l’animal. Les arbres creux, les souches, les rondins, les cavernes, les terriers de marmottes ou de renards inoccupés, ainsi que les granges ou les autres bâtiments du genre comptent parmi les abris préférés du raton laveur.
En milieu urbain, il peut opter pour une cheminée de maison, un égout, un garage, un grenier, un arbre ou un ponceau. Les mâles adultes sont souvent seuls dans leur gîte, mais il n’est pas rare de voir une famille passer son premier hiver ensemble. On a déjà observé des terriers communautaires regroupant jusqu’à 23 individus, mais ils en comptent le plus souvent quatre ou cinq. Même s’il n’utilise qu’un seul gîte pendant l’hiver, le raton laveur dispose de plusieurs refuges pour les autres saisons.
Caractéristiques uniques
Le nom de lotor, désignant l’espèce, a été donné au raton laveur en raison de l’habitude qu’il aurait de laver sa nourriture avec ses pattes de devant. En fait, ce comportement est probablement lié à la recherche et à la capture de proies aquatiques comme les écrevisses. Il est sans doute inné, puisqu’on l’a observé chez des spécimens en captivité, même quand ils ne disposaient pas d’eau.
Aire de répartition
On dénombre si espèces de ratons laveurs sur l’ensemble du continent américain (Amérique du Nord, Amérique centrale et Amérique du Sud) et dans certaines îles des Antilles. Toutefois, Procyon lotor est la seule espèce que l’on trouve dans le Sud du Canada, dans certaines parties des États-unis et en Amérique centrale.
L’espèce habite toutes les provinces canadiennes, sauf Terre-Neuve-et-Labrador, et étend graduellement son aire vers le nord à mesure que l’agriculture prend de l’expansion. Dans les années 1930, elle a été introduite en Allemagne et en Union soviétique. Elle est maintenant présente au Luxembourg, en Allemagne de l’ Ouest, aux Pays-bas et en France.
Alimentation
Omnivore, le raton laveur mange à peu près de tout, cette nourriture pouvant être d’origine tant végétale qu’animale. Il préfère le maïs, les écrevisses, les fruits et les noix, mais son régime varie selon les saisons. Au printemps, ce sont les animaux, les invertébrés (les petits animaux sans colonne vertébrale) et les insectes qui constituent la plus grande partie de son alimentation. Il recherche surtout les écrevisses, mais il mange aussi des rats musqués, des écureuils, des lapins, des œufs d’oiseaux aquatiques et des palourdes d’eau douce. En été, les végétaux y compris les fruits et les noix l’attirent davantage. Il se délecte alors de cerises sauvages, de groseilles, de baies de sureau, de raisins sauvages, de fraises ainsi que de pommes de terre et de maïs sucré. Il se nourrit aussi de grenouilles, de petits poissons, de tortues, de larves de hanneton, de sauterelles de vers de terre, de grillons et d’escargots au cours de la belle saison.
Dans la plupart des secteurs où il en pousse, le maïs constitue le principal élément du régime automnal, mais les glands, les faînes, les noisettes et les raisins sont aussi recherchés. L’animal n’hésite pas à piller les nids d’insectes, tels que les frelons, les bourdons, les termites et les fourmis pour y dévorer les larves (premier stade de développement). Son épais pelage d’automne et d’hiver le protège contre les dards des irascibles frelons ou abeilles.
Photo: iStockphoto.com/Jennifer Richards
Le régime alimentaire d’automne est extrêmement important pour le raton laveur des régions septentrionales puisqu’il lui faut accumuler des réserves de graisse suffisantes en prévision de l’hiver. Le corps entier, y compris l’os de la queue, se recouvre d’une couche de graisse qui peut atteindre 2,5 cm d’épaisseur sur le dos. En fait, celle-ci peut constituer plus de la moitié du poids total de l’animal à la fin de l’automne. Dans les régions septentrionales, le raton laveur vit de ses réserves adipeuses (de graisse) au cours de l’hiver, tandis que plus au sud, où les noix et le maïs abondent, il continue sa quête de nourriture pendant toute l’année. À la périphérie des villes, on le voit souvent fouiller dans les poubelles ou patrouiller les pelouses à la recherche de vers de terre, de hannetons et de larves. Il peut aussi être nuisible pour les agriculteurs puisqu’il lui arrive de s’attaquer aux volailles et de s’emparer des œufs.
Haut de la pageReproduction
La reproduction commence généralement à la fin de janvier ou au début de février dans le nord de l’aire de répartition. Dans la plupart des secteurs, l’accouplement a surtout lieu en mars. Les jeunes naissent le plus souvent en mai même si certaines naissances ont déjà été observées dès le mois de mars ou encore à la fin de septembre. Il arrive cependant que le raton laveur des régions méridionales s’accouple tout au long de l’année.
Polygame, le mâle fécondera plusieurs femelles successivement. La femelle, par contre, est monogame et, après s’être accouplée avec un mâle, elle repoussera tous les autres. Souvent, les jeunes femelles s’accouplent au cours de la première année. Quant aux jeunes mâles, même s’ils sont capables de se reproduire, ils n’en ont habituellement pas la possibilité avant leur deuxième année en raison de la rivalité de leurs aînés. Les portées tendent à être plus grosses dans les régions nordiques puisqu’il n’est pas rare qu’elles comptent entre trois et sept jeunes, tandis qu’elles sont normalement de deux ou trois plus au sud. La gestation (période pendant laquelle la mère porte ses petits) dure en moyenne 63 jours.
À leur naissance, les petits n’ont pas de dents, leurs yeux sont clos et ils pèsent environ 75 g. Les dents perceront 19 jours plus tard tandis que les yeux s’ouvriront à l’âge de deux semaines et demie. Environ dix jours après la naissance, les petits arborent déjà le masque et le pelage caractéristiques de l’espèce. Ces derniers restent dans le gîte maternel pendant environ huit semaines : ils accompagnent ensuite leur mère dans sa quête de nourriture, même s’ils ne sont pas totalement sevrés avant l’âge de deux mois. Le mâle ne participe pas à leur élevage.
La cellule familiale se compose de la mère et de ses petits. Ils sont plutôt sociables, cherchant leur nourriture ensemble la nuit et partageant la même tanière le jour. Au cours du premier été, la mère montre à ses jeunes comment grimper, chasser et nager. La famille ne se dissout habituellement pas avant l’arrivée de la prochaine portée, normalement le printemps suivant. Les jeunes mâles quittent souvent le territoire des mères tandis que les jeunes femelles peuvent rester dans les parages.
La longévité de l’espèce varierait entre trois et cinq ans en milieu naturel; la majorité de la population est entièrement remplacée en sept ans. Cependant, des records de longévité de 12 et de 16 ans respectivement ont été observés chez des individus en captivité et en milieu naturel.
Conservation
L’homme est le principal prédateur du raton laveur. Étant donné la valeur de sa fourrure, entre deux et quatre millions d’individus sont chassés et tués annuellement en Amérique du Nord. De plus, des milliers d’autres sont tués par des automobiles chaque année. La maladie constitue aussi une autre cause importante de mortalité. Ainsi, depuis 1983, plusieurs milliers de ratons laveurs succombent chaque année à la rage dans les États américains des régions centrales du littoral de l’Atlantique et dans ceux du Sud. La maladie semble vouloir maintenant se propager vers le nord et gagner le Canada. En outre, des milliers d’autres meurent annuellement de la maladie de Carré, particulièrement dans l’Est du Canada et aux États-Unis. Enfin, le raton laveur est souvent infesté de poux, de puces et de tiques, mais ces parasites ne semblent pas constituer un facteur de mortalité important.
Le couguar, le lynx roux, le coyote, le renard, le chien, le loup, le grand-duc et la martre sont également des prédateurs du raton laveur. Toutefois, ces espèces ne tuent qu’un petit nombre d’individus chaque année. La malnutrition et les rigueurs de l’hiver jouent probablement un plus grand rôle dans la limitation des populations, particulièrement chez les jeunes.
Bien que certains documents signalent que le raton laveur peut vivre très longtemps à l’état sauvage, de nombreux animaux meurent avant l’âge d’un an en raison de la maladie, du manque de nourriture, des prédateurs ou des trappeurs. Dans certains secteurs, on a estimé que le taux de mortalité annuel des populations de ratons laveurs variait entre 50 et 60 p. 100.
La forme de rage propre aux ratons laveurs appelée « la rage du raton laveur » est une maladie mortelle résultant d’une infection virale. Elle se transmet surtout par la salive s’il y a morsures ou si le virus entre en contact avec une plaie ouverte ou les muqueuses des yeux ou de la bouche. Le premier signalement de la maladie remonte à juillet 1999 dans l’est de l’Ontario. Sa présence a ensuite été signalée au Nouveau-Brunswick en 2000 et au Québec en 2006. En 2007, on dénombrait 59 cas de rage au Canada. Il se classe au troisième rang des animaux infectés année-là. L’Ontario et le Nouveau-Brunswick ont circonscris la propagation de l’infection par divers moyens, y compris le recours à un programme de vaccination. Actuellement, cette infection est à l’état d’épizootie au Québec avec la confirmation de 58 cas en 2007.
Photo: iStockphoto.com/Clark Wheeler
Les ratons laveurs sont également porteurs d’un nématode parasitique appelé Baylisascaris procyonis qui est un pathogène pour les humains. Les œufs sont évacués dans les excréments des ratons laveurs et sont pratiquement indestructibles. Il semble qu’environ 12 personnes, surtout des enfants, sont décédées à la suite de la transmission de ce parasite.
Pour certaines personnes, le raton laveur est un animal nuisible, rusé et tenace. En effet, il cause souvent des dommages importants aux cultures de maïs, par exemple, et d’autres, moins graves, dans les vergers, les vignobles, les champs de melons et les basses-cours. Il est aussi considéré comme indésirable dans les zones d’aménagement de la sauvagine ou du gibier à plumes des hautes terres parce qu’il détruit les nids et s’attaque aux jeunes. Dans les secteurs urbains, on l’accuse de ravager les garages, les potagers, les pelouses et les toitures des maisons. Pour se débarrasser d’un individu nuisible, la seule solution consiste souvent à l’abattre ou à le prendre au piège afin de le relâcher ailleurs, ce qui peut toutefois contribuer à la diffusion des maladies. Des études récentes ont en effet démontré que des ratons laveurs ainsi déplacés franchissaient de grandes distances en peu de temps et deviennent ainsi d’excellents vecteurs de maladies contagieuses comme la rage.
L’amélioration de l’habitat pour les ratons laveurs devrait favoriser la conservation des arbres et billots creux où l’animal pourra trouver refuge, de même que la culture de végétaux comme le maïs afin de lui assurer une source d’alimentation. Toutefois, peu d’aménagements sont nécessaires dans les villes, car le raton laveur trouve facilement le moyen de se mettre à l’abri dans les constructions qui s’y trouvent. Les populations prospèrent dans la plupart des régions et aucun déclin de l’espèce n’est prévisible dans un avenir rapproché.
Ressources
Ressources en ligne
Le raton laveur
Le raton laveur
Ressources imprimées
BANFIELD, A.W.F. Les mammifères du Canada, 2e éd., Musées nationaux du Canada, Québec (Qc), Les Presses de l’Université Laval, 1977.
BEAUDIN, L., et M. Quintin. Guide des mammifères terrestres du Québec, de l’Ontario et des Maritimes, Waterloo (Qc), Éd. du Nomade, 1983.
GEHRT, S. Raccoons. Wild Mammals of North America, éd. G. Feldhamer et B. Thompson. Johns Hopkins University Press, Baltimore, MA, 2003.
© Sa Majesté la Reine du chef du Canada, représentée par le ministre de l’Environnement, 1987. Tous droits réservés.
N° de catalogue CW69-4/47-1987F
ISBN 0-662-94135-7
Texte : Richard C. Rosatte. Mis à jour de Bradely Turcott avec révisions de Rick Rosatte en 2008.
Photo : Robert McCaw