Paysage
Fédération canadienne de la fauneEnvironnement et Changement climatique Canada
English

Fiche d’information
Version imprimable

Audio et video
Le mouflon, clip vidéo

 

Description

Le mouflon est un mammifère massif à sabots, dont la taille est environ une fois et demie celle du mouton domestique. Le mouflon d’Amérique du Nord est apparenté à la fois au mouton domestique (Ovis aries), importé d’Europe par les premiers colons, et au mouton originaire d’Asie.

On croit qu’il y a environ un demi-million d’années, un mouton primitif, semblable au mouton de Marco Polo que l’on retrouve actuellement en Asie centrale, a émigré en Amérique du Nord en passant par la langue de terre de Béring, qui reliait autrefois les régions aujourd’hui appelées Russie et Alaska. Au cours de la dernière période glaciaire, lorsque les glaces polaires ont descendu lentement vers le sud, les mouflons ont été isolés dans deux zones libres de glace, sortes de refuges dont l’un était situé au centre de l’Alaska, et l’autre au sud du fleuve Columbia et de la rivière Snake, aux États-Unis. Les mouflons de l’Alaska ont évolué en une nouvelle espèce appelée mouflon de Dall (Ovis dalli), aux cornes élancées, tandis que ceux du Sud ont constitué le mouflon d’Amérique (Ovis canadensis), animal aux cornes massives des Rocheuses et des régions désertiques de l’Ouest.

Lorsque les glaces ont commencé à se retirer, il y a de 10 000 à 20 000 ans, le mouflon du Nord a étendu son habitat vers l’est jusqu’aux monts Mackenzie, et vers le sud jusqu’à la rivière de la Paix, située dans le Nord de la Colombie-Britannique. Progressivement, deux sous-espèces ou races de mouflon de Dall se sont formées, l’une blanche et l’autre presque noire. Le mouflon de Dall à pelage noir est aussi appelé mouflon de Stone. Dans la région du mont Pelly, au Yukon, les mouflons noirs et les mouflons blancs de Dall se mêlent peu à peu. Le curieux produit de tels croisements, connu sous le nom de mouflon de Fannin, a la tête, le cou et la croupe de couleur blanche, mais le corps gris.

Cornes du mouflon

Figure 1

Le mouflon du Sud a donné sept sous-espèces, dont deux ont regagné le Canada après le retrait des glaciers. Le mouflon des Rocheuses et celui de Californie ressemblent au mouflon de Dall, mais leur pelage tire habituellement sur le brun ou le gris. Ils ont tous deux une tache blanche sur la croupe.

Des cornes massives en forme de volute caractérisent les mâles adultes. Les femelles adultes ont des cornes légèrement courbées d’environ 30 cm de long (voir la figure 1).

Les cornes du mouflon des Rocheuses atteignent 125 cm de longueur et 460 mm de circonférence à la base. Elles sont souvent émoussées à leur extrémité et forment habituellement une spirale rapprochée de la face de l’animal. Les cornes du mouflon de Dall ordinaire et du mouflon de Dall noir sont plus élancées, forment une plus large spirale que celle du mouflon des Rocheuses et sont ordinairement pointues aux extrémités. La circonférence maximale à la base des cornes du mouflon de Dall est de 400 mm. Les deux cornes du mâle pèsent parfois plus de 13 kg.

Les cornes de cet animal, qui sont des excroissances épidermiques recouvrant un cornillon de forme conique, sont permanentes. Elles croissent toute sa vie durant, formant chaque hiver, au moment du ralentissement de la croissance, un cercle proéminent, ou bourrelet. Ces cercles fournissent aux biologistes un moyen commode pour déterminer l’âge de l’animal.

À l’âge adulte, le mouflon mâle, ou bélier, des Rocheuses mesure environ un mètre de hauteur au garrot et peut peser 136 kg ou plus, en automne, lorsqu’il est en excellente condition physique. Au printemps, son poids moyen est d’environ 100 kg, tandis que celui de la femelle est d’à peu près 63 kg. Le mouflon de Dall ordinaire et le mouflon de Dall noir sont un peu plus petits, les mâles adultes pesant en moyenne moins de 90 kg, et les femelles, ou brebis, environ 50 kg.

Empreinte dans la boue

Figure 2

Les sabots avant du mouflon de montagne sont légèrement plus gros que ses sabots arrière, mais ils laissent tous une empreinte de forme quasi rectangulaire. Le bord extérieur des sabots est dur et rigide, tandis que la sole de forme concave (courbée vers l’intérieur) est molle, ce qui permet une excellente prise en terrain rocheux.

Le mouflon de montagne a, à l’avant de la bouche, huit incisives tranchantes qui lui servent à couper les plantes dont il se nourrit. Ses autres dents (molaires et prémolaires), qui sont profondément enracinées, sont adaptées à la mastication. Toutes ses dents s’usent progressivement, mais ce processus s’accélère si sa nourriture contient beaucoup de particules dures et de matières ligneuses (de la nature du bois).

Le pelage, ou robe, du mouflon est court et rude. II n’est jamais fin et laineux comme celui du mouton domestique. Vers la fin de l’été et en automne, le mouflon d’Amérique, surtout le mâle, a un beau pelage brun, le museau blanc, une tache blanche sur la croupe et du blanc à l’arrière des pattes. Au printemps, le brun de son pelage a perdu de son éclat à cause de la rupture de l’extrémité fragile de ses poils, et devient d’un gris brun d’aspect terne. Une fois l’an, habituellement vers le mois de juin ou de juillet dans le Sud du Canada, les mouflons perdent leur poil et, jusqu’à ce qu’il ait repoussé, ils ont une apparence négligée, des effiloches de poils pendant de leur robe ici et là.

Signes et sons

Le bêlement de la femelle est un son guttural qu’elle fait entendre surtout lorsque ses petits sont jeunes, probablement en vue de les prévenir d’un danger. Les petits du mouflon ont un bêlement semblable à celui des agneaux. Quant aux mâles, ils ne font entendre qu’une sorte de reniflement, habituellement en guise d’avertissement ou en prélude à un combat.

Haut de la pageHaut de la page

Habitat et habitudes

II y a peu d’animaux qui soient mieux adaptés à des variations extrêmes d’altitude et de température que les magnifiques mouflons des chaînes de montagnes de l’Ouest de l’Amérique du Nord. Les femelles, accompagnées de leurs agneaux et de mouflons adolescents, et les mâles passent l’été chacuns de leur côté dans des prés alpins.

En novembre et en décembre, l’accumulation de la neige force l’animal à descendre de son territoire d’été. Lorsque l’activité sexuelle diminue, à la fin de décembre et de janvier, les mâles retournent entre eux en célibataires. L’aire d’hivernage du mouflon est d’étendue relativement réduite et se compose de prés découverts orientés vers le sud.

Caractéristiques uniques

Dès 1540, l’explorateur espagnol Coronado décrivait en ces termes les mouflons qu’il avait observés au voisinage de la Californie : « ... des moutons aussi gros que des chevaux, avec de très grosses cornes et une petite queue. Certains avaient des cornes si énormes que c’était merveille à voir ».

L’intrépide géographe David Thompson et son compagnon, Duncan McGillivray, ont été les premiers à capturer un mouflon du Canada; cela se passait en 1800, près du début du cours supérieur de la rivière Bow, juste à l’est de l’actuel parc national de Banff.

Dans les années qui ont suivi, le mouflon d’Amérique du Nord est devenu l’un des trophées les plus raffinés et les plus recherchés au monde par les chasseurs de gros gibier. L’inaccessibilité de l’habitat ainsi que l’agilité et la rapidité du mouflon donnaient à l’heureux chasseur un réel sentiment de fierté.

Le mouflon de montagne est très agile, ne cédant sa place qu’à la chèvre de montagne quand il s’agit de gravir une pente escarpée. Cependant, la chèvre est plutôt une grimpeuse ou une « marcheuse », alors que le mouflon, qui bondit à la façon d’un cerf-mulet, se déplace bien plus vite.

Le mouflon de montagne a une vue extrêmement perçante. Il peut remarquer de légers mouvements et voir de petits objets à plus d’un kilomètre de distance. Étant donné qu’il vit dans les étendues montagneuses dégagées, un ennemi peut difficilement s’approcher de lui sans être vu; il n’a donc pas besoin d’une ouïe ni d’un odorat très développés.

Haut de la pageHaut de la page

Aire de répartition

La répartition du mouflon

L’habitat du mouflon s’étend des champs de neige des Rocheuses canadiennes à la région désertique de la vallée de la Mort, en Californie, située au-dessous du niveau de la mer, ainsi que de l’Alaska jusque dans le Nord du Mexique.

Lorsque les glaces ont commencé à se retirer, il y a de 10 000 à 20 000 ans, le mouflon du Nord a étendu son habitat vers l’est jusqu’aux monts Mackenzie, et vers le sud jusqu’à la rivière de la Paix, située dans le Nord de la Colombie-Britannique. Progressivement, deux sous-espèces ou races se sont formées. Le mouflon de Dall à pelage blanc se rencontre en Alaska, au Yukon et dans l’ouest du district de Mackenzie. Son cousin au pelage presque noir, appelé mouflon de Stone ou mouflon de Dall à pelage noir, vit dans le Nord de la Colombie-Britannique et dans le Sud du Yukon. Dans la région du mont Pelly, au Yukon, les mouflons noirs et les mouflons blancs de Dall se mêlent peu à peu pour produire le mouflon de Fannin.

Le mouflon du Sud a donné sept sous-espèces, dont deux ont regagné le Canada après le retrait des glaciers. Les mouflons des Rocheuses sont remontés au nord dans les Rocheuses de la Colombie-Britannique et de l’Alberta, jusqu’au sud de la rivière de la Paix. Les mouflons de Californie se sont dispersés dans le Sud-Ouest de la Colombie-Britannique, peuplant les montagnes dénudées et les vallées des rivières des régions de l’Okanagan et de Chilcotin.

Haut de la pageHaut de la page

Alimentation

Les herbes et les plantes basses de même nature constituent la base de l’alimentation du mouflon. Cet animal mange rarement des brindilles et des arbrisseaux, contrairement au cerf et à l’orignal qui en dépendent. Par contre, il mange beaucoup de chiendent, de fétuque, de pâturin des prés et de carex. Il mange aussi du trèfle, de la vesce d’Amérique, du lupin, de la sauge des prés, des saules rabougris et de la quinte-feuille, lorsqu’il en trouve. De plus, il recherche avidement les roches salifères, c.-à-d. qui contiennent du sel, surtout au printemps et en été. En hiver, l’animal trouve sa pâture sous une mince couche de neige, dans une aire relativement réduite composée de prés découverts orientés au sud.

Haut de la pageHaut de la page

Reproduction

Au Canada, les petits du mouflon naissent entre le début de mai et la mi-juin. Habituellement, la femelle ne donne naissance qu’à un petit, quoiqu’il y ait parfois des jumeaux. Au moment de mettre bas, la femelle quitte son troupeau pour se réfugier dans un ravin ou un canyon écarté. Deux ou trois jours après sa naissance, le petit peut facilement suivre sa mère, même s’il chancelle sur ses pattes. Comme les mouflons sont grégaires, la femelle se hâte de rejoindre son troupeau, qui comprend habituellement 10 individus ou plus, soit des femelles, des petits, des juvéniles d’un an et des jeunes mâles.

Au début, les agneaux tètent fréquemment pour se nourrir du riche lait de leur mère, puis, vers l’âge de deux semaines, ils commencent à brouter des plantes tendres. Ils sont sevrés, ou cessent de téter, vers l’âge de cinq ou six mois. Ils ont une croissance rapide, leur poids passant d’environ 4,5 kg à la naissance à environ 29 kg à la fin du premier été.

Les agneaux sont très enjoués; leurs ébats sont parfois laissés sous la surveillance d’une femelle, tandis que les autres femelles vont paître.

Lorsque les agneaux atteignent l’âge de quelques semaines, les troupeaux émigrent vers des territoires d’été plus haut dans les montagnes. C’est là que les femelles et leur suite engraissent, dans des prés luxuriants parsemés de fleurs alpines, de cascades et de plaques de neige éternelle. Les mâles adultes, habituellement en groupes de 5 à 15, passent l’été ailleurs en montagne.

Au cours de l’été, il s’établit un ordre hiérarchique parmi les béliers, selon la taille de leurs cornes; cela se fait habituellement sans accrochage sérieux. Toutefois, lorsque deux d’entre eux ont des cornes de même taille comme lorsque des bandes étrangères se rencontrent, la question de prédominance se règle par un combat. Le vainqueur a droit aux femelles.

La vue d’un combat entre deux mâles puissants et de force égale constitue un spectacle inoubliable. Après s’être éloignés de 10 à 12 m, les animaux se ruent l’un sur l’autre tête première. Le choc peut parfois être entendu à plus d’un kilomètre. Heureusement, la double couche osseuse du sommet du crâne protège leur cerveau. Habituellement, ils s’en tirent sans autre dommage qu’un craquèlement de l’extrémité des cornes. Après quelques assauts, les mâles se séparent comme si de rien n’était, sans que l’observateur puisse toujours deviner qui est le vainqueur.

La plus grande partie de l’activité sexuelle du mouflon, y compris les combats qu’elle occasionne, survient en novembre et en décembre, alors que la neige devient abondante au point de forcer l’animal à descendre de son territoire d’été. Lorsque cette activité diminue, à la fin de décembre et de janvier, les mâles s’éloignent des femelles et se groupent entre eux. L’aire d’hivernage du mouflon est d’étendue relativement réduite et se compose de prés découverts orientés au sud, où l’animal trouve sa pâture sous une mince couche de neige.

Haut de la pageHaut de la page

Conservation

Le mouflon est porteur d’une foule de parasites, mais peu d’entre eux lui sont mortels. Si son aire d’hivernage ne contient pas suffisamment de nourriture ou si la saison est rigoureuse, le mouflon peut s’affaiblir au point où des parasites comme le nématode, en association avec des bactéries qui causent la pneumonie, peuvent causer des épidémies et faire disparaître des troupeaux entiers. La gale et d’autres maladies transmises par le mouton domestique peuvent avoir les mêmes conséquences.

Un certain nombre de mouflons meurent accidentellement des suites de combats, de chutes, d’avalanches ou de collisions avec des autos. Les prédateurs, notamment le loup dans le Nord et le couguar dans le Sud, dévorent régulièrement leur part d’animaux âgés ou malades, mais ils ne constituent pas une menace pour la survie de l’espèce. Parce qu’il peut escalader des falaises trop abruptes pour d’autres animaux, un mouflon en bonne santé peut presque toujours échapper à ses poursuivants. Le coyote, l’ours, le lynx du Canada, le lynx roux et l’aigle capturent, bien que rarement, des mouflons nouveau-nés ou malades.

C’est le manque de nourriture adéquate au cours de l’hiver qui constitue la plus grave menace à la survie des mouflons. En effet, les aires d’alimentation sont pratiquement illimitées en été; mais en hiver, des troupeaux entiers sont parfois réduits à paître dans des territoires de quelques hectares seulement, à cause de la neige. Ils doivent même les partager souvent avec le mouton domestique, les bovins, les chevaux ou des animaux sauvages tels que le wapiti. La sous-alimentation qui en résulte est parfois la cause directe de la mort des mouflons; mais plus souvent, elle en constitue la cause indirecte en les rendant vulnérables aux maladies, aux éléments et aux prédateurs.

Au début du XIXe siècle, il y avait probablement plus d’un million de mouflons en Amérique du Nord. Actuellement, il n’y en a que 25 000 environ. On ne connaît pas exactement le nombre de mouflons de Dall ordinaires et de mouflons de Dall noirs, mais on pense qu’il a peu varié depuis le début de la colonisation. La plus importante diminution du nombre de mouflons, qui s’est produite entre 1850 et 1900, a été due aux maladies transmises par le mouton domestique, à l’empiétement des bestiaux sur leur territoire et à la chasse excessive pratiquée par l’humain.

Heureusement, des mesures de conservation adoptées récemment ont mis fin à ce déclin, et certains troupeaux grossissent. Bon nombre de mouflons d’Amérique se trouvent actuellement en sécurité dans des parcs nationaux et des réserves de gibier. La réglementation restrictive de la chasse et la réintroduction de mouflons dans les habitats qu’ils occupaient auparavant ont contribué à accroître le nombre de ces animaux. Comme dans le cas du bison, le nombre de mouflons d’Amérique ne sera jamais ce qu’il a déjà été parce que l’homme a définitivement occupé ou modifié une grande partie de leur territoire. Toutefois, on espère que de nouvelles introductions d’animaux, de nouveaux parcs et de nouvelles réserves ainsi que de meilleures méthodes de pâturage pour les bestiaux amèneront un accroissement du nombre de ces animaux majestueux et uniques que sont nos mouflons d’Amérique.

Haut de la pageHaut de la page

Ressources

Ressources imprimées

BANFIELD, A.W.F. Les mammifères du Canada, 2e éd., Presses de l’Université Laval et University of Toronto Press, 1977.

DUMAIS, R. Les mammifères de mon pays, Montréal, Éditions de l’Homme, 1968.

WOODING, F.H. Les mammifères sauvages du Canada, LaPrairie (Québec), Éd. Marcel Broquet, 1984, p. 27-30.

© Sa Majesté la Reine du chef du Canada, représentée par le ministre de l’Environnement, 1984. Réimprimé avec corrections en 1988. Tous droits réservés.
No de catalogue CW69-4/16-1984F
ISBN 0-662-92505
Texte : Don Blood
Photo : Corel