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Fédération canadienne de la fauneEnvironnement et Changement climatique Canada
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Description

Le lièvre d’Amérique (Lepus americanus), l’un de nos animaux forestiers les plus communs, ne se trouve qu’en Amérique du Nord. Timide et discret, il passe souvent inaperçu en été, mais dès la première neige, il se trahit par des traces caractéristiques et des pistes (sentiers ou coulées) très fréquentées.

Comparaison des traces du lièvre d'Amérique et du lièvre de Townsend

Bien adapté à son environnement, le lièvre d’Amérique a de larges pattes postérieures recouvertes d’une fourrure abondante qui lui permettent de se mouvoir aisément sur la neige. De plus, les quatre longs orteils de chaque patte s’écartent largement dans la neige molle, ce qui augmente encore plus la taille de ces « raquettes ». Le changement saisonnier de la couleur de son pelage constitue une autre adaptation remarquable : de gris brun en été, la fourrure devient d’un blanc presque immaculé au milieu de l’hiver. Le pelage est composé de trois couches de poils : un duvet dense et soyeux gris ardoise, des poils plus longs aux extrémités beige jaunâtre et de longs jarres plus raides. La modification de la couleur du pelage, qui se produit deux fois par année et est déclenchée par les variations saisonnières de la longueur des jours, se manifeste par la mue progressive et le remplacement des jarres extérieurs

Traces du lièvre d'Amérique

Les mues du lièvre d’Amérique, qui se produisent deux fois par année, débutent en août ou en septembre ainsi qu’en mars ou en avril. Habituellement, les pattes de derrière gardent des taches de fourrure blanche jusqu’à l’été. Dans les régions côtières humides du Sud-Ouest de la Colombie-Britannique, de l’État de Washington et de l’Oregon, où les chutes de neige sont rares, le pelage des lièvres d’Amérique reste brun toute l’année.

Les oreilles du lièvre d’Amérique sont plus petites que celles de la plupart des autres lièvres. Elles comptent de nombreuses veines, ce qui aide à régulariser la température du corps; les lièvres du désert, par exemple, ont de très grandes oreilles et très peu de fourrure de façon à ce que le sang puisse se rafraîchir à la moindre brise. Puisque les lièvres d’Amérique vivent dans des environnements froids, ils n’ont pas besoin d’avoir de si grandes oreilles pour les aider à abaisser la température de leur corps.

Les femelles du lièvre d’Amérique, ou hases, sont souvent un peu plus grosses que les mâles. Un lièvre d’Amérique adulte pèse en général de 1,2 à 1,6 kg. Les lièvres sont habituellement plus lourds pendant la période la plus intense du cycle démographique ou juste au début du déclin de ce cycle.

Signes et sons

Le lièvre d’Amérique est en général silencieux, mais il peut montrer son mécontentement en grognant. Les rares fois où ils sont pris, ils poussent un cri aigu qui surprend parfois les chasseurs, qui les laissent alors tomber. Pendant la saison de reproduction, les lièvres et les hases émettent un genre de cliquètement entre eux. Les hases utilisent également ce son afin de rappeler auprès d’elles les levrauts pour les nourrir.

 

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Habitat et habitudes

Le lièvre d’Amérique vit dans la forêt boréale, c’est-à-dire la forêt la plus septentrionale de l’hémisphère Nord. Son aire de répartition s’étend jusque dans des montagnes des États-Unis. Dans l’Est du Canada et dans des régions montagneuses, la forêt est surtout constituée de conifères (épinettes et sapins), alors que dans les grandes étendues de l’Alberta, de la Saskatchewan et du Manitoba, la forêt est composée en grande partie de feuillus (peuplier faux-tremble et peuplier baumier). Le lièvre d’Amérique vit dans de nombreux types de forêts. En général, il préfère les zones qui ont un sous-étage dense, ou couche de plantes sous le couvert forestier principal, peu importe qu’il soit composé de jeunes arbres ou de grands arbustes. Ce couvert le protège des prédateurs et lui procure de la nourriture.

Le domaine vital du lièvre d’Amérique — la zone à l’intérieur de laquelle il vit habituellement — s’étend sur environ six à dix hectares. Le lièvre y construit un réseau complexe de pistes qui sillonnent son territoire. Ces pistes, que le lièvre emprunte pour aller des zones d’alimentation aux aires de repos, sont très fréquentées par le lièvre ainsi que par d’autres espèces, comme les écureuils, les porcs-épics et les moufettes. Les principales pistes suivent le même tracé en été et en hiver, et le lièvre d’Amérique les entretient avec soin, enlevant promptement les tiges et les feuilles qui commencent à entraver les coulées; l’animal peut avoir besoin de ces parcours pour échapper aux prédateurs.

Le lièvre d’Amérique est très actif du coucher du soleil jusqu’à l’aube, et il le demeure pendant tout l’hiver. La pluie, la neige ou le vent réduisent souvent ses activités de façon marquée. Pendant la journée, le lièvre d’Amérique se repose tranquillement dans des endroits abrités appelés « gîtes », sous un buisson, une souche ou un rondin. Il sommeille de façon intermittente et il fait sa toilette en léchant sa fourrure, mais il est toujours aux aguets.

S’il est menacé, le lièvre d’Amérique peut figer sur place pour tirer avantage de sa fourrure camouflante, ou il peut s’enfuir. Les levrauts âgés de moins de deux semaines, qui ne peuvent pas encore se déplacer rapidement, restent immobiles. Les lièvres d’Amérique plus âgés s’enfuiront probablement; souvent, ils aperçoivent les prédateurs avant d’être vus et ils peuvent s’éloigner sans être vus. Ils se déplacent en bondissant, parfois sur une distance de 3 m à la fois, et peuvent atteindre une vitesse de 45 km/h. Ce trait distingue les lièvres des lapins. En effet, alors que les lièvres préfèrent courir pour échapper aux prédateurs, les lapins, pour leur part, s’empressent d’atteindre des terriers souterrains et de s’y cacher; les lièvres vont rarement sous terre. Cette différence de comportement est liée à certaines différences anatomiques, notamment au fait que le lièvre a un cœur plus volumineux, ce qui l’aide à courir.

 

Caractéristiques uniques

Les spectaculaires fluctuations cycliques des populations de lièvres d’Amérique sont bien connues. D’une régularité remarquable, ces fluctuations se produisent environ tous les 10 ans et sont répertoriées depuis plus de 200 ans dans les registres de la Compagnie de la Baie d’Hudson. Lorsque la population atteint un sommet, les lièvres peuvent être extrêmement abondants, leur densité atteignant de 500 à 600 lièvres par kilomètre carré. De telles périodes d’abondance se produisent sensiblement à la même époque dans toute l’aire de répartition du lièvre d’Amérique, même si le moment le plus intense peut varier de un à trois ans d’une région à une autre. Les déclins des populations sont en grande partie causés par la prédation.

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Aire de répartition

Répartition du lièvre d'Amérique

Répartition du lièvre d'Amérique

Le lièvre d’Amérique est présent dans chaque province et territoire du Canada. Il vit dans la forêt boréale et les prolongements méridionaux de cette forêt, le long des Appalaches dans l’est et le long des Rocheuses et de la chaîne des Cascades dans l’ouest. On trouve des lièvres d’Amérique aussi loin vers le sud qu’en Caroline du Nord, au Nouveau-Mexique et en Californie. Vers le nord, il est présent jusqu’à l’océan Arctique : il fréquente les baissières (ou dépressions) où poussent des saules, dans le delta du fleuve Mackenzie.

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Alimentation

Le lièvre d’Amérique se nourrit d’une variété d’espèces de plantes herbacées au cours de l’été, notamment de vesces, de fraises, d’épilobes, de lupins, de campanules et de certaines herbes. Il mange aussi beaucoup de feuilles d’arbustes. Son alimentation hivernale se compose de petites brindilles, de bourgeons et d’écorce de nombreuses espèces de conifères et de feuillus. Son aire géographique est si vaste que le lièvre d’Amérique de différentes régions peuvent avoir une alimentation complètement différente, qui dépend entièrement du type de forêt dans laquelle il se trouve.

Le lièvre se lève souvent sur ses pattes postérieures pour atteindre des arbustes jusqu’à une hauteur de 45 cm du sol afin de les couper. Avec l’accumulation de la neige, il peut couper des branches encore plus hautes. Dans les années où la population est la plus élevée, le lièvre d’Amérique peut faire mourir des gaules et des arbustes en prélevant des anneaux de leur écorce. Il mange quelquefois de la viande provenant de carcasses d’autres animaux. En fait, la plupart des petits herbivores, comme les souris, les campagnols et les lapins, consomment de la viande à l’occasion, quand elle est disponible; les bonnes sources de protéines sont rares dans les aliments végétaux, ce qui fait que la plupart des herbivores consomment de la viande lorsqu’ils le peuvent.

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Reproduction

Le lièvre d’Amérique commence à se reproduire dès le printemps suivant sa naissance. La saison de reproduction débute à la mi-mars par des parades nuptiales. Chaque hase accueille des mâles pendant environ 24 heures, d’abord en mars, puis le lendemain de la naissance de chaque portée, soit de deux à quatre fois pendant l’été. Au cours de cette journée, les hases et les lièvres se déplacent souvent ensemble en quête de nourriture, avec des intermèdes passés en poursuites mouvementées et en sauts l’un par-dessus l’autre. Les hases s’accouplent souvent avec plusieurs mâles.

La première portée voit habituellement le jour en mai, après 36 jours de gestation. Les portées comptent de un à 13 levrauts. La première portée de chaque été est habituellement la plus petite, comptant de trois à quatre levrauts. La deuxième, par contre, est souvent la plus nombreuse, soit de quatre à sept petits en moyenne.

À sa naissance, le lièvre d’Amérique a les yeux ouverts, est couvert de fourrure et est capable de sautiller presque immédiatement. Une telle précocité est caractéristique des lièvres en général, et contraste de façon marquée avec les lapereaux, qui naissent nus et aveugles. Les jeunes lièvres d’Amérique ne sont nourris qu’une fois par jour, habituellement dans la soirée, et deviennent autonomes à l’âge de trois ou quatre semaines. Ils pèsent de 45 à 75 g à la naissance et prennent 450 g en un mois pour atteindre la masse d’un adulte moyen, soit 1,4 kg, à l’âge de cinq mois.

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Conservation

Le lièvre d’Amérique est sujet à une grande variété de maladies d’ordre viral, bactérien et parasitaire. Il est aussi victime de nombreux prédateurs, dont les plus communs sont le lynx du Canada, le renard roux, le coyote, le vison, le Grand-duc d’Amérique et l’Autour des palombes. Les levrauts âgés de moins de deux semaines sont tués le plus souvent par des écureuils roux et des écureuils terrestres. De 1 à 40 p. 100 des lièvres d’Amérique survivent chaque année, et le taux varie à l’intérieur du cycle démographique de 10 ans. Bien que le lièvre d’Amérique puisse vivre jusqu’à l’âge de six ans, peu d’entre eux survivent si longtemps; ils ont vraiment beaucoup de chance lorsqu’ils peuvent vivre jusqu’au deuxième été de reproduction.

Le lièvre d’Amérique est le petit gibier le plus important du Canada. Il constitue un élément de base du régime alimentaire des peuples autochtones, et, sur l’île de Terre-Neuve, depuis l’introduction de l’espèce en 1870, des milliers de lièvres d’Amérique sont pris au collet chaque année pour leur viande et vendus dans les marchés. Par contre, dans les Prairies, la population non autochtone hésite à manger du lièvre. Ce préjugé provient apparemment d’une croyance fort répandue voulant que les animaux soient porteurs d’une mystérieuse maladie qui provoque leur déclin cyclique.

Le lièvre d’Amérique est l’un des herbivores dominants et une importante espèce-proie de la forêt boréale; à ce titre, il contribue à la diversité de cet écosystème. Puisqu’ils servent souvent de proie, les lièvres d’Amérique sont essentiels au maintien du réseau alimentaire de nos forêts. En fait, des recherches menées au Yukon ont montré que le lièvre d’Amérique pourrait être une espèce clé ou centrale. L’exploitation forestière, les incendies de forêt, la conversion de l’habitat et le réchauffement de la planète modifient la répartition et la qualité des habitats forestiers. Le cycle de 10 ans du lièvre d’Amérique et de ses prédateurs est un modèle unique, dominant et à grande portée dans les forêts canadiennes, et nous ne savons pas jusqu’à quel point la modification de l’habitat influera sur ce modèle.

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Ressources

Ressources en ligne

Ministère des Richesses renouvelables du Yukon, séries sur les mammifères (en anglais seulement)

Ressources imprimées

CROTEAU, A. 1973. Québec chasse et pêche, 3(2) : 22, Montréal, Les publications plein air, inc., 1973.

DUCHESNAY, E.J. Faune illustrée du Québec, St-Louis de Courville (Québec), Éditions St-Louis, 1961.

DUMAIS, R. Les mammifères de mon pays, Montréal, Les éditions de l’homme, ltée, 1968.

MÉLANÇON, C. Nos animaux chez eux, Montréal, Éditions du jour, 1972.

POUPART, H. Québec chasse et pêche, 2(3) : 25, Montréal, Les publications plein air, Inc., 1972.

© Sa Majesté la Reine du chef du Canada, représentée par le ministre de l’Environnement, 1974, 2003, 2005. Tous droits réservés.
No de catalogue CW69-4/44-2003F-IN
ISBN 0-662-89099-X
Texte : L.B. Keith
Révision scientifique : Karen E. Hodges, 2002
Révision : Maureen Kavanagh, 2002, 2005
Photo : Gordon Court